guerre

  • Vaudou

    Le néolibéralisme est mort

    Vive le néolibéralisme

    Se poser la question d’un retour aujourd’hui du fascisme implique d’une part de se demander si l’on n’a pas affaire à quelque chose de tout autre (le technofédoalisme) mais aussi de considérer ce qu’il est advenu du régime “précédent”, qui s’est justement constitué officiellement à la fois contre le fascisme et contre le socialisme, non sans assumer un noyau autoritaire : le néolibéralisme.  Dans un premier article (celui-ci) on se demandera ce qui permet de parler de mort du néolibéralisme ou de sa perpétuation sous une forme “zombie”.  Dans un second article on verra comment,  épuisé et soumis à des tensions internes et externes, il pourrait avoir fini par muter.  Enfin, dans un troisième article conclusif on se demandera si ces mutations ne sont pas autant de portes  ouvertes vers d’autres régimes et d’autres imaginaires politiques. Et comment ceux-ci peuvent s’articuler.

    Le néolibéralisme est mort, vive le néolibéralisme

    À Seattle en 1999 ou à Gènes en 2001,  la lutte contre le néolibéralisme prenait la forme d’un siège. Celui d’une citadelle inexpugnable, défendue par des miliers de policiers et militaires, abritant les instances internationales décidant de l’avenir du monde. Le néolibéralisme semblait solide, arrogant, indéboulonnable et ne reculant devant rien pour se maintenir.

    Il était peut-être en réalité plus fragile qu’il n’y paraissait. La crise de 2008, l’élection de Trump, l’helicopter money ou le “quoi qu’il en en coûte” du Covid, des fissures seraient une à une apparue le long de l’édifice, semblant s’approfondir jusqu’à le mettre en péril.  Le point de bascule n’est pas à chercher du côté de l’intervention publique en soutien aux marchés - on le sait, le néolibéralisme (et c’est cela qui le distingue du libéralisme classique) accepte ou plutôt requiert l’intervention politique. C’est ce qu’affirmait Walter Lippmann il y a un siècle dans The Good Society : les marchés ne sont pas des émanations naturelles, mais construits par l’homme, sous-tendus par des lois humaines, maintenus par des institutions. La question n’est pas plus celle de l’autoritarisme - on sait que le néolibéralisme veut protéger l’économie de la démocratie. Les penseurs néolibéraux ont toujours cru en un Etat fort, certes guidé par des normes et des limites strictes.

    Acte de décès 

    Mis bout à bout, que dessinent les interventions des banques centrales, les rachats de dettes, le quantitative easing, le contrôle du spread des taux, 1000 milliards de dette rachetées dans la zone euro, la banque centrale du Japon qui détient 8% de la capitalisation boursière du pays ? Et si on ajoute à cela une pincée de plans de relance (6 billions de dollars juste pour les USAs), une once de too big to fail, la transformation des banques centrales en nouvelles assurances anti-faillites garantissant les revenus futurs ? C’est le sacro-saint principe du marché qui se trouve désavoué. Ajoutons la guerre commerciale entre la Chine et les US, la fragilisation des chaînes d’approvisionnement, l’économie de guerre, les prix planchers et le protectionnisme tous azimuts, c’est l’utopie globaliste d’un monde sans frontière où les États seraient réduits à peau de chagrin, qui est écornée. Et le rêve d’une société dépolitisée, peuplée d’homo oeconomicus pacifiés et rationnels, piétiné (populisme, Trump, Bolsonaro, le Capitole, gilets-jaunes et gros-biceps). Il paraitrait même que finalement, “there really is such a thing as society”. Pour ceux qui doutent encore, ajoutons que les “Move Fast and Break Things” et “Competition is for loosers” qui ont fait le succès des Thiel et Zuckerberg ont effectivement participé à ébranler l’édifice. Enfin, la multiplication et l’intensification des guerres couplées à la crise écologique finira par rendre flagrant l’évidence : le néolibéralisme n’est plus. Même son principal soutien politique, le parti démocrate américain, qui en fit la promotion idéologique sous Clinton comme sous Obama, semble l’avoir abandonné. Désormais, soutenu en cela par quelques bailleurs privés qui ont senti le vent tourner, il veut faire croire à un “nouveau consensus de Washington” (selon le discours de Jake Sullivan en 2023). Nous serions donc entrés dans cette nouvelle ère “post-néolibérale”, d’un nouveau dirigisme économique et politique - d’aucuns voyant là le terreau d’un “néo-fascisme”, d’un “néo-fordisme”, d’une “néo-réaction”, voire d’un nouveau néolibéralisme (selon sa niche universitaire).

    Le plastique c’est fantastique

    Mais n’est-ce pas aller un peu vite en besogne ? Idéologiquement, le néolibéralisme est plastique et hétérogène. Ce n’est pas une doctrine figée, encore moins une vulgate, mais plutôt un espace organisé selon différents pôles.

    La tension global-national

    Quinn Slobodian a montré qu’au cours des années 90 un clivage s’est affirmé en son sein, scission entre globalistes et nationalistes, les premiers continuant de soutenir que le projet néolibéral doit être réalisé par l’intermédiaire de traités, institutions et législations supranationales, tandis que les seconds veulent faire primer l’échelle nationale et les traités bilatéraux. L’un des points de cristallisation de la controverse est la question de la construction européenne, projet évidemment soutenu par les uns et contesté par les autres. Déjà, dès les années 50, Wilhelm Röpke, chef de file des ordolibéraux, voyait dans le projet globaliste une menace pour les libertés individuelles et pour la diversité culturelle, l’incarnation de la modernité technocratique et le risque d’un futur État-providence supranational. Bref, une (auto)route vers la servitude.

    La suite de l’histoire est connue : la multiplication des traités de libre-échange, la construction européenne ou encore la fondation de l’OMC témoignent du succès des globalistes pendant les années 90 et 2000. Or, c’est ce succès qu’ont remis en question le Brexit et l’élection de Trump, plus que le néolibéralisme lui-même. Le Brexit n’est pas juste une réaction des laissés pour compte de la mondialisation, avides de retrouver leur souveraineté, ou un rêve de vieux conservateurs aux accents réactionnaires. Il s’agit aussi d’un projet politique néolibéral et nationaliste dont on trouvait déjà la trace dans le discours de Thatcher à Bruges en 1988 : “Nous n’avons pas réussi à faire reculer les frontières de l’Etat en Grande-Bretagne pour les voir réimposer au niveau européen avec un super Etat européen exerçant sa nouvelle domination depuis Bruxelles.” (“We have not successfully rolled back the frontiers of the state in Britain, only to see them re-imposed at a European level with a European super-state exercising a new dominance from Brussels”). Dans cette lignée, l’Europe est perçue comme un poids et une entrave pour le libre fonctionnement de l’économie britannique, le Brexit devant permettre au Royaume-Uni de se libérer et d’approfondir la dérégulation. Comme le dit fièrement le think-thank néolibéral Institute of Economic Affairs : “Hayek would have been a Brexiteer” !

    Un conservatisme historique

    L’espace du néolibéralisme se structure également dans une tension entre des pôles conservateurs et progressistes, le positionnement variant d’une période à l’autre. La phase de destruction de l’État-social, au Royaume-Uni et aux Etats-Unis, s’est fait dans le cadre d’un projet conservateur, incarné par Thatcher et Reagan. Avec d’un côté, There’s No Such Thing as Society et la destruction des obstacles entravant l’économie, et de l’autre, un appel constant à la famille, à la chrétienté, à l’homophobie, au militarisme. Ces projets politiques restaient cohérents avec les sources théoriques dominantes du néolibéralisme. Chez Hayek et Röpke on retrouve une même admiration pour Burke, une même haine de la démocratie et des masses, une même volonté de verrouiller la société par l’élitisme et l’aristocratisme. Le premier a rédigé des constitutions alors que le second pensait que la solution se situait surtout dans le social et les valeurs. D’ou une ode à la paysannerie :

    qui concilie de manière idéale vie et travail, production et consommation, espace d’habitation et espace de labeur, nature et activité humaine […], développement indépendant de la personnalité et chaleur du contact social. [La paysannerie] oppose à la face industrielle et urbaine de notre civilisation tradition et persévérance […], mesure et sérénité, existence non artificielle […], unité de l’existence et insertion humble dans la chaîne du devenir et de la mort.

    Ringard ? C’est le moins qu’on puisse dire, tant le néolibéralisme est aujourd’hui devenu synonyme de la société de consommation, de la marchandisation sans limite (jusqu’au corps : capital humain, sexuel ou biométrique) et des excès des goldenboys et des yuppies.

    Christian Bale avec une hache dans American-Psycho

    Mais un penchant progressiste    

    Le néolibéralisme n’est pourtant pas pure contrainte, pur nihilisme ou pure aliénation. Son succès repose sur sa capacité à capter et canaliser les désirs, même d’émancipation. C’est ainsi qu’un néolibéralisme progressiste, mélange entre des erzats d’idéaux d’émancipation, une financiarisation et une dérégulation sous-stéroïdes, a pu être incarné par Tony Blair au Royaume-Uni, la gauche caviar en France, tous deux précédés Outre-Atlantique par les “New Democrats” :

    In place of the New Deal coalition of unionized manufacturing workers, African Americans, and the urban middle classes, he forged a new alliance of entrepreneurs, suburbanites, new social movements, and youth, all proclaiming their modern, progressive bona fides by embracing diversity, multiculturalism, and women’s rights. Even as it endorsed such progressive notions, the Clinton administration courted Wall Street. Turning the economy over to Goldman Sachs, it deregulated the banking system and negotiated the free-trade agreements that accelerated deindustrialization.

    (Nancy Fraser)

    L’époque combative du néolibéralisme [avec pour objet la destruction du socialisme, sous l’impulsion de Thatcher et Reagan] a été suivie d’une période de 20 ans de “néolibéralisme normatif” [sous l’impulsion donc du parti démocrate], qui était une tentative d’imposer le marché comme la mesure ultime et incontestée de la valeur - non seulement par rapport aux sphères dans lesquelles le mécanisme des prix était présent, c’est-à-dire les sphères d’échange économique, mais aussi aux sphères où le mécanisme des prix était absent. [Il] ne s’agit pas simplement d’essayer de défendre le marché sur le terrain de la liberté économique - ce que le libéralisme avait fait pendant 300 ans - mais en fait d’affirmer certains mécanismes d’évaluation et d’évaluation économiques comme les dénominateurs ultimes de l’organisation de la société.

    (William Davies)

    Une gouvernementalité de crise, une subjectivité en crise La capacité du néolibéralisme à se réagencer s’explique par son hétérogénéité, ses tensions internes (nationalisme-globalisme, progressivisme conservatisme), mais aussi parce qu’il a fait des crises un outil de gouvernance :

    Le remède n’est plus là pour mettre fin à la crise. La crise est au contraire ouverte en vue d’introduire le remède. (…) [Proclamer la mort du néolibéralisme après 2008] c’est de n’avoir pas compris que la «crise» n’était pas un fait économique, mais une technique politique de gouvernement (…) Nous ne vivons pas une crise du capitalisme, mais au contraire le triomphe du capitalisme de crise.

    (À nos amis)

    Elle a mis un peu de temps à prendre forme, mais il semble qu’une stratégie du choc cohérente est en train d’émerger de la pandémie. [Elle] se dessine à toute vitesse, alors même que les corps continuent de s’entasser, et fait des semaines d’isolement physique que nous avons vécues non pas une douloureuse nécessité destinée à sauver des vies, mais un laboratoire à ciel ouvert, avant-goût d’un avenir sans contact, permanent et hautement profitable.

    (Naomi Klein)

    It’s certainly early days, and I can only speak to the American context, the discussions I’ve been following. You don’t hear about these game plans in the media. But they are talking about specific things — for example, all kinds of successes, from their point of view, with regard to medical developments. […] These are the sorts of projects they’ve long had on the back burner. And now they see, “this is our chance.” Partly as an unintended consequence of the crisis, but also because the neoliberals are poised and ready to give it the final nudge to make these things happen.

    (Philip Mirowsky dans How Neoliberalism Will Exploit the Coronavirus Crisis)

    Tel le chat, le néolibéralisme retombe toujours sur ses pattes. Mais au-delà de sa capacité à tirer profit des crises, la preuve de la permanence de son règne ne se lit-elle pas dans la permanence de son produit le plus réussi : l’homme néolibéral ?

    [Les néolibéraux] ont changé le sens de ce qu’est un marché [non plus comme une allocation de ressources rares, mais] comme un problème épistémique - le marché est le plus grand processeur d’information connu de l’humanité.

    (Mirowsky)

    Le néolibéralisme est une rationalité, le marché devient une (voire la seule) forme d’objectivité et de connaissance. L’État étant réduit à un rôle de garant des règles dun jeu (et soulagé du rôle de garant de la cohésion sociale), c’est le marché qui produit non pas une société mais une diversité d’opinions, de modes de vie, de valeurs, de choix, de goûts. Il en découle une contamination de cette rationalité économique (la concurrence en particulier) à des domaines jusqu’alors non marchands de l’existence humaine. La santé et l’éducation bien sûr, mais jusqu’aux nations, villes et régions entières qui peuvent être considérées comme des acteurs compétitifs. En passant par le “moi”.

    Vous faites des investissements en vous-même et vous vous attendez, avec certes une profonde incertitude, à en récolter les fruits à l’avenir. Dans le même temps vous marketez votre apparence. Et tout cette logique d’autogestion s’étend à la recherche d’emploi mais aussi aux relations entièrement non marchandes telles que la recherche d’un date, d’un conjoint ou d’un ami”

    (William Davies)

    La concurrence produit… une sorte de contrainte impersonnelle qui oblige de nombreux individus à adapter leur mode de vie d’une manière qu’aucun ordre ou instruction délibérée ne peut provoquer ».

    (Hayek)

    C’est ce qu’avait très tôt identifié Foucault, en se penchant sur la théorie du capital humain : à la vision néolibérale du marché correspond un nouvel homo oeconomicus, “l’entrepreneur de soi”.

    Or, La subjectivité néolibérale n’est pas l’appanage du winner, du jeune cadre dynamique (par ailleurs triathlète, adepte d’un régime no-glu paléo et réalisant ses exercices respiratoires de 5h à 6h du matin pour débloquer le potentiel productif de son cerveau). Elle s’est diffusée à l’ensemble de la société, elle est partout et même là où on l’attend le moins : dans les salles de sports cheaps, sur les applis de rencontre, dans les milieux radicaux ou réactionnaires et même dans les sphères religieuses (islam de marché, développement personnel chrétien, coaching judaïque etc.).

    Jésus notre modèle de développement personne

    La subjectivité néolibérale s’est même raffinée depuis les années 80. Wendy Brown parle d’un glissement d’une “forme entrepreneuriale de néolibéralisme, vers une autre forme profondément infléchie par la financiarisation”. Il ne s’agit plus d’être sa “petite entreprise” mais de se considérer comme un portefeuille d’actifs “en quête de crédit, c’est-à-dire se compren[dre] comme investissant [soi]-même dans son propre capital humain, et comme espérant des autres qu’ils investissent également dans celui-ci”. Dès lors, la rétribution dépend moins d’une production effective que de la mise en scène d’une capacité potentielle à produire. Logique de l’influenceur1.

    Mais n’y a-t-il pas un épuisement de ces subjectivités dont les nombreuses pathologies de l’époque sont les symptômes : TDAH, dépression, burn-out, troubles bipolaires, workaholic, addictions, bigorexie etc. ? C’est ne pas voir que comme les néolibéralismes, les subjectivités qu’il produit sont résilientes. Il faut que ces subjectivités soient fracturées, fêlées, si ce n’est brisées, pour pouvoir se renforcer. L’essor du cross-fit (parmi d’autres pratiques sportives extrêmes) en est un exemple : pratiqué majoritairement par des cadres, il essore le pratiquant, qui doit pousser toujours plus lourd, éxécuter des mouvements toujours plus rapides, pour brûler toujours plus de “cal” sur une bande-son au rythme effréné, pour oublier la douleur, mais aussi le vide. La lenteur de l’apprentissage ? Le pratiquant décline, il s’ennuie, veut souffrir, se donner le sentiment d’être un “survivant”, que ce qui ne tue pas le rend plus fort. No pain, no gain. Trop collectif ? Optez pour l’ultra-trail. Pas assez d’adversité ? Passez au MMA. Pratiquez-les de la même manière, et surtout faites-le savoir.

    Zuckerberg heureux

    La persistance du néolibéralisme grâce à sa reconfiguration

    Croire à la fin du néolibéralisme c’est croire au fait qu’il ait pu exister par le passé dans une version pure et globalisée. Dans laquelle l’ensemble de ses plans (idéologique, économique, politique, subjectif) auraient été parfaitement articulés. Il n’y a pas eu d’âge d’or du néolibéralisme (ou sur un temps court - entre les années 90, de la période de la Troisième Voie, de la mondialisation et des Nouveaux Démocrates jusqu’à l’entrée de la Chine dans l’OMC en 2001 - et dans des endroits particuliers du globe). Est-il vraiment en train de rendre son dernier souffle ? À regarder ses effets on répondra de toute évidence, non. L’ensemble semble si souple qu’il parait incassable. À l’image de ses subjectivités, les “crises” de ces dernières années pourraient l’avoir stimulé et revivifié.

    À l’inverse, la tendance qui consiste à repérer dans toute interaction sociale sa permanence (la permanence de la crevardise, qu’importe le régime politique ou les politiques économiques) ne peut mener qu’à la cécité. On finit ainsi par admettre (souvent, il faut le dire, pour garantir la survie de chaires d’études foucaldiennes sur le sujet) l’existence d’un néolibéralisme des plans des plans de relance, d’un néolibéralisme coiffé d’une tête de bison, d’un néolibéralisme anti-libéral. Enfin, en observant le néolibéralisme uniquement depuis ses points d’applications, depuis les micro, bientôt les nano-pouvoirs, on prend le risque de perdre toute profondeur de champ. On prend le risque de parcelliser l’analyse à l’infini. On en vient à accepter de ne plus voir de plan d’ensemble et finalement assumer à la fois de ne plus rien comprendre, et qu’il n’y a pas d’issue.

    Comprendre les reconfigurations implique de partir des tensions qui animent le néolibéralisme - pour le maintenir en vie, mais à quel prix pour lui ? Des tensions internes et critiques externes venant d’au-delà de ses pôles : titillé par le paléoconservatisme, titllé par le libertarianisme. Or ces mises en tensions et leurs exacerbations ne sont pas sans conséquence (sinon on n’en parlerait pas). S’il n’y a jamais eu d’articulation parfaite entre ses plans, le plan des politiques publiques, celui de la doctrine, celui du régime économique mondial, et celui des sujets, il faut constater un niveau de désarticulation extrême. Bien qu’il soit résilient, et même s’il résiste, même s’il sait se placer dans l’ombre, même s’il se pare de faux-nez, il finit par être modifié par ses propres efforts de contorsionisme. Il finit par muter. Pour le pire ?

    Rendez-vous au prochain épisode…

    Notes

    1. Pour les plus curieux, notre première livraison analysait, sous un autre angle, ce raffinement de la subjectivité néolibérale. ⤴️

  • Paradis

    Walking deads

    Édito - avril 2024

    Ce serait l’heure des come-backs : le retour de l’Etat, et avec lui de la guerre et de l’autoritarisme. De ce constat débutent deux analyses dominantes, l’une qui voudrait que l’on assiste en direct à la résurrection du fascisme ; et l’autre à l’inverse que rien n’a changé, et que le pseudo-renouveau était déjà à l’oeuvre, à la périphérie (du regard ou de l’occident). Il faut savoir reconnaître et écarter ce qui relève de la tentation de remplir l’armoire à concepts (néo-fascisme, nouveau néolibéralisme) comme celle de ne voir partout que des agitations superficielles (pendant que l’économie continue de modeler le monde). On essaiera plutôt de repérer des ruptures dans l’organisation du pouvoir - et puis sont-elles synonymes de faiblesses, cachent-elles des plaies (à saler) ou des occasions de fuir (armé) ? Cette livraison est encore en cours d’élaboration.

  • Mutant

    Néolibéralisme : zombies et mutants

    Mort, il marche encore sur la terre

    Se poser la question d’un retour aujourd’hui du fascisme implique d’une part de se demander si l’on n’a pas affaire à quelque chose de tout autre (le technofédoalisme) mais aussi de considérer ce qu’il est advenu du régime “précédent”, qui s’est justement constitué officiellement à la fois contre le fascisme et contre le socialisme, non sans assumer un noyau autoritaire : le néolibéralisme.  Dans un premier article on se demandera ce qui permet de parler de mort du néolibéralisme ou de sa perpétuation sous une forme “zombie”.  Dans un second article (celui-ci) on verra comment,  épuisé et soumis à des tensions internes et externes, il pourrait avoir fini par muter.  Enfin, dans un troisième article conclusif on se demandera si ces mutations ne sont pas autant de portes  ouvertes vers d’autres régimes et d’autres imaginaires politiques. Et comment ceux-ci peuvent s’articuler.

    Néolibéralisme : zombies et mutants

    On avait dans un premier article exposé les arguments qui permettent à certains de déclarer la mort et l’enterrement définitif du néolibéralisme, et à d’autres de le voir s’être insinué partout, jusque dans nos gênes. Pour caricaturer, on peut voir aussi bien dans les populismes, les Bidenomics et l’affrontement commercial entre la Chine et les USAs, la péremption du cadre néolibéral, que dans la crevardise des influvoleurs, sa permanence. Si la première posture s’articule notamment avec une énième tentative de réechanter la gauche (et l’État), la seconde revient à forclore toute possibilité de changement… et donc à condamner toute possibilité révolutionnaire. Faute politique évidente autant qu’erreur d’analyse. Regardons une autre hypothèse : que le néolibéralisme survit, se survit, et ce faisant mute, et que ce n’est pas sans risque (pour nous, pour lui).

    Vive la crise ?

    Croire à l’incessante résilience du néolibéralisme passe souvent par le fait de prendre pour acquis le discours qu’il a sur lui-même. Il provoquerait des crises pour avancer ses pions, et lorsqu’elles surviennent de l’extérieur il s’en saisirait comme des opportunités. Vive la crise ! Bien sûr il y a du vrai dans cette affirmation, Friedman disait ainsi :

    Only a crisis - actual or perceived - produces real change. When that crisis occurs, the actions that are taken depend on the ideas that are lying around. That, I believe, is our basic function: to develop alternatives to existing policies, to keep them alive and available until the politically impossible becomes the politically inevitable.

    Et les plans d’ajustement structurel imposés par le FMI sur les pays du Sud global maintenus dans un état de sous-développement ne sont pas des fantasmes. Il n’y a par ailleurs aucun doute sur le fait que le néolibéralisme s’est présenté comme une solution à l’inflation et à la stagflation de la fin des années 70 en Occident. Mais, il faut savoir faire un pas de côté, prendre un peu de recul.

    Profiter de la crise de systèmes concurrents, que ce soient le keynésianisme, le socialisme ou le tiers-mondisme est une chose. Répondre à une crise provoquée par le système en est un autre. La résilience du néolibéralisme ne doit pas uniquement être évaluée à partir du constat de son maintien ou des forçages qu’il impose en période de turbulence, il faut aussi se demander si sa légitimité est toujours intacte. Où en est sa part de rêve ? A ce propos, J. Peck et N. Theoddore affirment que : “The very emptiness of these futures represents an important difference between the current conjuncture of late neoliberal authoritarianism and its predecessors from the 1970s and 1980s, the time when empty promises of a better, freer, and more prosperous future had yet to be historically tested”. Il ne s’agit d’ailleurs pas d’une question secondaire pour les auteurs néolibéraux, ils ne misent pas tout sur la “gouvernance par le milieu” ou l’Etat fort. Röpke écrit que “le succès du communisme est favorisé par une âme vide plutôt que par un estomac vide”. Les néolibéraux sont des intellectuels de combat, ils ne restent pas dans une tour d’ivoire : think-thanks, ouvrages de vulgarisation, conférences, revues, construction de personnages publics et même une série documentaire (Free to Choose) etc. Il s’agit avant tout d’une gouvernance par la liberté.

    Le néolibéralisme est mort. Mais survit comme un zombie

    Le néolibéralisme est donc bien là, et son hégémonie écornée comme jamais. Les signes de ce qui est au moins une crise de légitimité s’amoncellent. Quiet quitting, big quit, écoanxiété, on attend avec impatience la guerranxiété. Dégagisme dans l’arène politique et multiplication de (non)mouvements en dehors (rien qu’en France  : Zads, 2016, GJs, contre le pass sanitaire, manifs nocturnes contre Louis XVI, émeutes pour Nahel ). Le futur se présente comme angoissant et apocalyptique, ce qui n’échappe pas à l’industrie culturelle : “On est trop sur la planète/J’en déduis qu’ils vont tous nous tuer ” (Booba), la Fièvre, la Peste. Concédons aux puristes (révolutionnaires et micropoliticiens professionnels) qu’il ne s’agit guère d’oppositions franches au néolibéralisme. Cette accumulation atteste tout de même de son affaiblissement. Le manque d’adhésion aux régimes néolibéraux est compensé par le recours à la force. C’est pourtant une banalité : qui n’a que la coercition est affaibli. Même dans les régimes dit “autoritaires” le pouvoir recoure aux réseaux de clientélisme, à des idéologies, à des corps intermédiaires, à une instrumentalisation des traditions et valeurs etc.

    Comme le dit aujourd’hui l’un des anciens économistes de Clinton (et qui considérait encore en 1999 le néolibéralisme comme la seule utopie encore vivante)

    On peut dire que le néolibéralisme est en train de mourir, mais le nouveau monde lutte pour émerger. Comme disait Gramsci, “maintenant c’est l’heure des monstres”. Il me faut encore 6 mois pour déterminer si le néo-fascisme est une vague qui a réellement de l’avenir. Et si les algorithmes vont être sources de progrès et d’égalité ou l’inverse, dans la manière de gérer les affaires sociales. La chose intelligente à dire est que oui le néolibéralisme est mort ou en passe de l’être, mort mais comme un zombie : il marche encore sur la Terre.

    Pourquoi continue-t-il à marcher ? Parce qu’il n’y a personne pour le décapiter à coup de machette. Le maintien du néolibéralisme s’explique davantage par la faiblesse de ses adversaires que par sa supposée résilience à toute épreuve. Mais que faut-il comprendre par ses adversaires ? Une force qui lui est radicalement opposée et étrangère ? La pureté révolutionnaire ? Rien n’est moins sûr. Ce qui nous guette c’est un scénario à la X-men, un monde peuplé de mutants.

    Logique de la mutation

    Dans la succes story du néolibéralisme il y a le rôle principal (le néolibéralisme comme rationalité politique fondée sur une certaine conception du marché) mais aussi les seconds couteaux. Le caractère compositionnel du néolibéralisme, qui participe à sa résilience, l’amène à se colorer différemment, et selon le contexte, au contact du conservatisme ou du progressisme. Cela répond à l’une de ses faiblesses originelles : l’extension du marché et de l’individualisme à l’ensemble de la société entraine une dynamique centrifuge, un risque de dissolution de la société, d’anomie. Et les néolibéraux le savent. Déjà en 1958 W. Röpke, le chef de file des ordolibéraux, écrivait dans Au-delà de l’offre et de la demande :

    Les hommes qui s’affrontent sur le marché, et, poursuivant leur profit, comptent l’emporter, doivent être d’autant plus liés moralement et socialement à la communauté, sinon la concurrence dégénère elle aussi des plus dangereusement. En d’autres termes, l’économie de marché n’est pas tout : elle doit s’insérer dans un contexte général plus élevé qui ne peut se fonder sur l’offre et la demande, la liberté des prix et la concurrence. Elle doit être tenue fortement dans le cadre d’un ordre général (…) L’homme, par contre, ne peut trouver le plein épanouissement de sa nature que s’il s’intègre de son propre gré dans une communauté et s’y sent lié solidairement. Sinon il mène une existence misérable. Et il le sait.

    C’est l’un des moteurs de la reconfiguration incessante du néolibéralisme : il a besoin de s’appuyer sur d’autres rationnalités politiques.  S’appuyer, mais ne pas les absorber, au risque de les réduire à de vulgaires marchandises. Angle mort de la laïcité, le “retour du religieux” n’est plus une béquille pour le néolibéralisme quand il s’affaise dans la marchandisation. Qu’est-ce qui fascine le bloom dans les images du hajj ? La piété ou les hôtels 5 étoiles qui entourent la Ka’ba ? Les précheurs 2.0 n’assèchent-ils pas la parole divine au point de la réduire au développement personnel ? Sans mauvais jeux de mots, cela ne peut qu’approfondir le désert.

    Ribéry mange une entrecôte en or

    Une question importante est donc celle de l’autonomie laissée à ces autres rationnalités politiques. Wendy Brown remarquait déjà que dans la séquence qui a suivi le 11 septembre 2001 néolibéralisme et néoconservatisme n’étaient ainsi pas les deux faces d’une même pièce. Qu’il n’y a pas nécessairement de symbiose entre le néolibéralisme et ses adjuvants. Dans le cas du néolibéralisme et du néoconservatisme, bien que leurs intérets convergaient, il existait des points de tension évidents concernant notamment le puritanisme, l’individualisme, la participation politique ou encore le rôle du gouvernement.

    Le néolibéralisme mutant

    Trump et Brexit

    Le cas de Trump a été longuement commenté. Rupture populiste avec le néolibéralisme pour les uns, symbole de sa reconfiguration pour les autres. La mise en lumière des pôles conservateurs et nationalistes du néolibéralisme va dans le sens de la seconde hypothèse. Si Trump a provoqué le retrait de l’accord de partenariat transpacifique, celui-ci a été suivi par la signature d’accords plus restreints, avec le Canada et le Mexique. Trump soutenait aussi un “hard Brexit” afin de renforcer les liens économiques avec le Royaume-Uni. Il ne s’agissait pas d’en finir avec le libre-échange mais de le reconfigurer. Sur le plan de la politique intérieure, il a poursuivi les politiques néolibérales : privatisations, dérégulation, baisses d’impôts sur les entreprises etc. Quant à la guerre commerciale contre la Chine et la réthorique protectionniste, il ne s’agissait de rien d’autres que de la poudre aux yeux. Il faut que tout change pour que rien ne change.

    Considérer le trumpisme comme un populisme ou une variante supplémentaire du néolibéralisme c’est manquer qu’il s’agit d’une synthèse entre différentes tendances - nationaliste, conservatrice, libertarienne, suprémaciste, évangéliste, masculiniste ou encore communautariste - qui entretiennent des rapports ambivalents avec le néolibéralisme. Quinn Slobodian affirme notamment que :

    [Les libertariens] viennent à la fois du mouvement néolibéral et sont contre celui-ci. L’une des qualités impressionnantes de la tradition intellectuelle néolibérale est la façon dont elle a plus ou moins maintenu sa cohérence malgré des différences d’opinion internes souvent importantes sur la gestion de l’argent, la migration, l’utilité du populisme et d’autres questions de division. La rébellion ouverte de certaines factions au sein de la grande tente est un retour à la tendance sectaire plus familière des mouvements intellectuels, et elle montre pourquoi il ne suffit pas de considérer le néolibéralisme comme l’idéologie domestique du capitalisme en tant que telle.

    Ainsi, si le trumpisme participe au maintien du néolibéralisme, il menace aussi de le faire bifurquer ou éclater.  Le trumpisme symbolise l’hybridation du néolibéralisme avec des rationnalités politiques qui lui sont extérieures si ce n’est antinomiques. Wendy Brown voit dans le trumpisme l’influence du “néofascisme” : mobilisation des masses, recours aux affects, virilismes, leader-charismatique, haine des élites, racisme, ressentiment etc. Bref, le cauchemar des néolibéraux :

    Ce qui triomphe sous le régime de Trump, c’est bien le raisonnement néolibéral et son préjugé en faveur des affaires et d’un économicisme généralisé. Cela dit, il faut se rappeler que pour les authentiques néolibéraux, ceux de Fribourg, de Vienne ou de Chicago, cet aboutissement serait un cauchemar. En effet, à quoi s’opposaient les néolibéraux ? Ils s’opposaient au fascisme, mais aussi à la mobilisation de masse des affects populaires, à la démocratie émotionnelle. Ils souhaitaient une séparation entre le monde de la compétition et des marchés, et l’État, qui pouvait certes être un État fort, mais qui devait être dirigé par des technocrates, ou à tout le moins comprendre son rôle comme étant de favoriser l’essor des marchés. Leur cauchemar était au contraire cette fusion des grandes entreprises et de la politique incarnée par Trump. Leur cauchemar était l’autoritarisme et l’irrationalité incarnés par Trump. Leur cauchemar était un régime politique réceptif à la mobilisation des affects populistes. Trump est leur Frankenstein.

    Frankenstein car Trump est une création, monstrueuse, du néolibéralisme lui-même. Ce dernier est à la fois responsable de la destruction de la démocratie et du resentiment sur lesquels Trump a capitalisé, et dans le même temps s’appuie sur le trumpisme pour perdurer.

    Cette logique de mutation est perceptible au-delà du trumpisme. Le Brexit symbolise l’hybridation entre néolibéralisme, libertarianisme et nationalisme. Discours protectionnistes, xénophobes et racistes, “Take back the control”; promotion du modèle de la cité-Etat, des zones franches et ports-francs : fascination pour Dubaï ; volonté de créer un “Singapore-on-Thames” ; projets d’accords de libre-échange bilatéraux ; promesses de dérégularisation ; “Hayek would have been a Brexiteer”. Le Brexit s’accompagne aussi, comme le note encore Slobodian, d’un projet de “sécession douce” : “le choix de la société par le biais de communautés fermées, le déplacement de[s] enfants dans les écoles privées, la création d’environnements médiatiques parallèles et en silo”.

    Les partis d’extrême-droite anti-austérité

    Les partis d’extrême-droite européens peuvent être vus comme un autre symptôme du même phénomène. Selon Melinda Cooper ces partis hybrident le néolibéralisme avec une réthorique et des politiques nationalistes et racistes, mais aussi avec des politiques économiques anti-austérités. Ces dernières s’intègrent dans le cadre d’un projet économique fasciste, “a heterodox economic formation, distinct from the equally heterodox methods of Keynesianism or socialism, [which is] defined by the attempt to overcome the threat of deflation without substantially threatening the existing distribution of wealth and income.” S’appuyant sur l’intervention de l’Etat, la limitation du marché, le natalisme, la création de monnaies parallèles et opposées à l’austérité, ces politiques économiques sont théoriquement antinomiques avec le néolibéralisme. Dans la pratique, les mouvements anti-austérité d’extrême-droite mélangent néolibéralisme et économie fasciste. D’un côté, en Italie, la coalition entre la Ligua et le M5S remplace la taxe régressive du gouvernement Monti par une flat tax, de l’autre elle instaure un “revenu de citoyenneté” (équivalent du RSA). En France, la trajectoire du Front National puis du Rassemblement National est également emblématique du phénomène. La politique économique du parti est le produit d’une tension entre un pôle néolibéral, incarné par le Club de l’Horloge, et un pôle antilibéral, le GRECE. Henry de Lesquen membre du premier, fait l’éloge du “libéralisme” de Ludwig von Mises, Friedrich Hayek, Jacques Rueff, Wilhelm Röpke, Lionel Robbins, Henry Simons, Milton Friedman et George Gilder, tandis qu’Alain de Benoist, figure de proue du second, lui a répondu par un petit texte, Contre Hayek. C’est le rapprochement du RN vers les idées du GRECE et le souverainisme qui explique, selon Cooper, le tournant social du parti. Bref, le néolibéralisme étant nécessairement compositonnel et ce d’autant plus qu’il est affaibli, on pourrait multiplier les études de cas: Hongrie d’Orban, pays du Golfe, République autoritaire de Macron, Inde de Mondi, Argentine de Milei, etc.

    L’hybridation entre le néolibéralisme et d’autres rationnalités politiques, on le voit, n’est pas sans conséquences pour lui. Le mélange entre néolibéralisme, conservatisme et nationalisme se fait aux dépens de sa version globaliste et progressiste. L’hybridation avec certaines tendances qui lui sont proches, notamment libertariennes, ouvre une possibilité de bifurcation. Le néolibéralisme, comme ce semble être le cas actuellement, peut réussir à maintenir sa domination sur les rationnalités politiques avec lesquelles il se compose (même avec les plus distantes et divergentes, comme le néoconservatisme et le néofascisme). C’est ce que d’aucuns nomment le “moment néofasciste du néolibéralisme”.

    Il faut souligner que les mutants peuvent se stabiliser en tant que tels. C’est par exemple le cas du Hezbollah libanais qui domine le pays du Cèdre depuis plusieurs années. II s’agit d’un côté d’une milice disposant d’importantes capacités militaires, en guerre contre Israël et aux côtés du régime syrien, diffusant un discours islamo-nationaliste teinté d’anti-impérialistes, s’appuyant sur des références religieuses chiites et produisant des subjectivités militaristes. D’un autre, c’est une organisation qui s’est complètement intégrée au système néolibéral libanais (J. Daher) et qui a intégré les pratiques de “bonne gouvernance” préconisées par les institutions internationales néolibérales (A. Daher).

    Mais il faut aussi envisager la possibilité que ces tendances profitent de la faiblesse du néolibéralisme pour s’imposer à lui, le cannibaliser et fonder une nouvelle espèce. Il faudrait alors renverser la formule et conclure à un moment néolibéral du néofascisme. Mais laissons l’étude de ces “sorties”, à un dernier article.